Item 221 – UE 8 – Hypertension artérielle de l’adulte : causes endocriniennes

 

Objectifs pédagogiques

Expliquer l’épidémiologie, les principales causes et l’histoire naturelle de l’hypertension artérielle de l’adulte

Réaliser le bilan initial d’une hypertension artérielle de l’adulte

Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient

Décrire les principes de la prise en charge au long cours

 

 

Plan

I. Principes du dépistage de l’HTA d’origine endocrinienne

II. Hyperaldostéronisme primaire

III. Phéochromocytome

IV. Autres causes rares d’HTA endocrine

Points clés

 

 

 

Principe du dépistage de l’HTA d’origine endocrinienne

 

L’hypertension artérielle (HTA) est définie par une moyenne de pression artérielle (PA) ? 140/90 mm Hg (systolique/diastolique) à partir de mesures cliniques répétées, réalisées au cabinet médical. La Haute Autorité de Santé (HAS) autorise également son diagnostic sur une moyenne diurne ? 135/85 mm Hg obtenue en automesure ambulatoire ou en mesure ambulatoire automatisée (MAPA).

Le bilan de l’HTA vise à vérifier sa permanence, à préciser par l’interrogatoire et l’examen la situation vasculaire (prévention primaire ou secondaire) et le retentissement de l’HTA (dont hypertrophie ventriculaire gauche ou d’autres anomalies de l’ECG), à identifier les autres facteurs de risque cardiovasculaire, ainsi qu’à dépister des éléments d’orientation vers une HTA secondaire. Les deux principaux intérêts de l’identification des causes endocriniennes d’HTA sont d’une part que le traitement de l’affection causale peut guérir l’HTA et, d’autre part, que ces maladies sont à l’origine d’autres comorbidités qui pourront être reconnues et traitées.

L’hypertension artérielle (HTA) est définie par une moyenne de pression artérielle (PA) > ou = 140/90 mm Hg (systolique/diastolique) à partir de mesures cliniques répétées, réalisées au cabinet médical. La Haute Autorité de Santé (HAS) autorise également son diagnostic sur une moyenne diurne > ou = 135/85 mm Hg obtenue en automesure ambulatoire ou en mesure ambulatoire automatisée (MAPA).

Le bilan de l’HTA vise à vérifier sa permanence, à préciser par l’interrogatoire et l’examen la situation vasculaire (prévention primaire ou secondaire) et le retentissement de l’HTA (dont hypertrophie ventriculaire gauche ou d’autres anomalies de l’ECG), à identifier les autres facteurs de risque cardiovasculaire, ainsi qu’à dépister des éléments d’orientation vers une HTA secondaire. Les deux principaux intérêts de l’identification des causes endocriniennes d’HTA sont d’une part que le traitement de l’affection causale peut guérir l’HTA et, d’autre part, que ces maladies sont à l’origine d’autres comorbidités qui pourront être reconnues et traitées.

Les examens paracliniques minimaux recommandés par l’HAS qui doivent, idéalement, être réalisés avant la prescription d’un traitement antihypertenseur sont indiqués dans le tableau 10.1. Les causes d’hypertension artérielle d’origine endocrinienne sont listées dans le tableau 10.2. Nous ne détaillerons pas ici les causes apparentées d’origine iatrogène.

 

Tableau 10.1

Bilan initial de l’HTA. (Source: CEEDMM, 2019.)

 

Tests et procédures

Mesure à jeun de potassium (K+)

Si possible sans garrot pour éviter une hémolyse et ne pas méconnaître une hypokaliémie

Mesure à jeun de créatinine

Le débit de filtration glomérulaire est estimé par les formules de Cockroft ou MDRD

Mesure à jeun du glucose

Mesure à jeun de cholestérol total, HDL-cholestérol et triglycérides

Le LDL-cholestérol est calculé à partir de ces fractions lipidiques

Recherche par bandelette réactive d’hématurie et de protéinurie

A quantifier sur 24 heures si le test est positif

Electrocardiogramme (12 dérivations)

 

Tableau 10.2

Etiologie de l’HTA d’origine endocrine. (Source: CEEDMM, 2019).

 

Type

Sous-types

Hyperminéralocorticismes primaires

Hyperaldostéronisme primaire par hyperplasie bilatérale ou adénome de Conn

HTA endocrines iatrogènes

Contraception oestroprogestative

Corticostéroïdes

Tumeurs sécrétant des catécholamines

Phéochromocytomes

Paragangliomes

Syndromes de Cushing

ACTH-dépendant ou ACTH-indépendant

Acromégalie

Hyperthyroïdie

Hyperparathyroïdie

 

Les causes d’hypertension artérielle d’origine endocrinienne sont présentes chez une minorité de patients hypertendus. Leur prévalence est d’environ 8 % pour l’hyperaldostéronisme primaire et moins de 1 % pour les phéochromocytomes et autres tumeurs chromaffines sécrétant des catécholamines (paragangliomes). On conçoit donc qu’il n’est pas envisageable de réaliser un dépistage systématique de l’hypertension artérielle d’origine endocrine à l’aide d’outils biologiques. Le seul bilan systématique à visée endocrinienne recommandé est la mesure de la kaliémie à jeun, si possible sans garrot, du fait de la fréquence de l’hyperaldostéronisme primaire. En revanche, il sera recommandé de rechercher une cause endocrinienne (au même titre que d’autres causes d’HTA secondaires) dans les situations suivantes, où leur prévalence est plus élevée :

  • HTA sévère de grade 3 (PA systolique ? 180 mm Hg ou PA diastolique ? 110 mm Hg) ;
  • HTA résistante (HTA non contrôlée malgré les règles hygiéno-diététiques et au moins trois médicaments antihypertenseurs à doses optimales) ;
  • HTA avec hypokaliémie (kaliémie ? 3,7 mmol/l) qui évoque un hyperaldostéronisme primaire avec fuite urinaire de potassium (kaliurèse inappropriée) ;
  • sujet jeune (moins de 30 ans) ;
  • HTA avec tumeur surrénalienne de découverte fortuite (incidentalome surrénalien) ;
  • retentissement vasculaire disproportionné par rapport à l’intensité de l’hypertension, qui évoque un hyperaldostéronisme primaire du fait des effets propres de l’aldostérone sur les vaisseaux ;
  • antécédent familial d’HTA précoce ou de complications cardiovasculaires avant 40 ans ;
  • antécédent familial au premier degré d’hypertension artérielle d’origine endocrinienne ;
  • signes cliniques associés évoquant une endocrinopathie.

 

 

Hyperaldostéronisme primaire

 

1. Dépistage de l’hyperaldostéronisme primaire

L’hyperaldostéronisme primaire est la cause la plus fréquemment responsable d’HTA endocrinienne, avec une prévalence de l’ordre de 8 à 10 %. Elle correspond à deux grandes entités : l’adénome de Conn, tumeur bénigne du cortex surrénalien représentant une maladie surrénalienne unilatérale, et l’hyperplasie bilatéraledans laquelle la production excessive et non contrôlée d’aldostérone dépend des deux glandes surrénales.

Le dépistage de l’hyperaldostéronisme primaire repose sur la mesure couplée des concentrations d’aldostérone et de rénine plasmatiques. Il est important de rappeler que de nombreuses conditions sont susceptibles d’influencer l’activité du système rénine-angiotensine et donc de perturber ce bilan, à la fois chez des patients hypertendus essentiels, mais également chez des patients présentant un hyperaldostéronisme primaire, et donc être responsable de faux positifs et faux négatifs du dépistage.

Ainsi, la production d’aldostérone et l’activité du système rénine-angiotensine sont influencées par la posture, les apports sodés et le tonus sympathique. Il est important de réaliser le dépistage dans des conditions standardisées concernant les apports en sodium et l’absence de médicaments interférents avec le tonus sympathique, avec la production de rénine ou d’aldostérone ainsi que la liaison de cette dernière à son récepteur. Par ailleurs, une kaliémie basse freine la sécrétion d’aldostérone et peut être à l’origine de faux négatifs du dépistage.

Ceci implique les précautions pré-analytiques suivantes :

  • demander que les patients ne fassent pas de régime désodé préalable et s’assurer que la natriurèse, qui reflète les apports sodés, est supérieure à 75 mmol/24 heures ;
  • une kaliémie supérieure à 3 mmol/l est donc souhaitable et peut justifier une supplémentation orale avant le prélèvement ;
  • les conditions de recueil recommandées sont un prélèvement matinal (non nécessairement au réveil) en position assise depuis au moins 15 minutes.

Idéalement le traitement devra être fait en l’absence de tout traitement antihypertenseur : les bêtabloquants diminuent la sécrétion de rénine ; les IEC et ARA II augmentent la sécrétion de rénine ; les diurétiques augmentent la sécrétion de rénine ; les inhibiteurs calciques dihydropyridines augmentent la production de rénine suite à la baisse de la tension artérielle et diminuent celle d’aldostérone par défaut de synthèse dont les étapes sont calcium-dépendantes ; les antihypertenseurs centraux baissent la sécrétion de rénine et d’aldostérone. La sévérité de l’hypertension conduit parfois à prescrire un antihypertenseur sans attendre que l’analyse biologique soit faite, ou bien le diagnostic peut être évoqué chez un patient déjà traité. Si le niveau tensionnel justifie un traitement hypertenseur, il est recommandé d’utiliser des inhibiteurs calciques non dihydropyridiniques et des vasodilatateurs alphabloquants. Un traitement par bêtabloquants peut être maintenu si son arrêt est jugé dangereux chez un patient coronarien, en sachant qu’il expose au risque de faux positif (diminution de la sécrétion de rénine).

Notons par ailleurs que l’insuffisance rénale diminue la sécrétion de rénine du fait de la réduction néphronique et de la rétention en eau et en sel. Enfin, citons les anti-inflammatoires non stéroïdiens qui induisent une rétention hydrosodée, la contraception orale contenant de l’éthinyl-œstradiol qui augmente la synthèse hépatique de l’angiotensinogène.

 

 

2. Diagnostic positif de l’hyperaldostéronisme primaire

La signature biologique de l’hyperaldostéronisme primaire est une concentration d’aldostérone plasmatique élevée en présence d’une concentration de rénine plasmatique basse, résultant en une élévation du rapport aldostérone/rénine.

Lorsque le rapport aldostérone/rénine est augmenté, du fait à la fois d’une diminution de la concentration de rénine et d’une augmentation de la concentration plasmatique d’aldostérone, le diagnostic positif hyperaldostéronisme primaire est très vraisemblable et sera confirmé par une deuxième mesure. Par contre, le rapport aldostérone/rénine s’il possède une bonne sensibilité expose au risque de faux positif, notamment du fait d’une baisse de la concentration de rénine sans élévation de la concentration plasmatique d’aldostérone (HTA à rénine basse).

Dans ce cas, il est nécessaire de réaliser des tests de confirmation de l’hyperaldostéronisme primaire. Ceux-ci sont réalisés en milieu spécialisé ; ils cherchent à démontrer une autonomie de la sécrétion d’aldostérone. Les conditions de réalisation de ces tests sont les mêmes que pour la mesure du rapport aldostérone/rénine. Parmi les tests possibles, la Société française d’endocrinologie recommande le test de charge sodée intraveineuse, réalisant une expansion volumique par un apport de sel aigu par voie veineuse. L’expansion volumique doit physiologiquement entraîner une réduction de la production d’aldostérone après quelques heures ; l’absence de freination caractérise hyperaldostéronisme primaire. L’alternative, notamment en cas de contre-indication, est le test au captopril, qui entraîne un blocage aigu de l’enzyme de conversion de l’angiotensine et doit physiologiquement entraîner une baisse de la concentration d’aldostérone plasmatique. L’absence de freination de la secrétion d’aldostérone caractérisera sa sécrétion autonomisée.

Par ailleurs, la mesure du rapport aldostérone/rénine permet d’éliminer d’autres causes d’HTA secondaires perturbant ce rapport, tels que :

  • hyperaldostéronisme secondaire caractérisé par une modification du rapport, avec augmentation de la sécrétion d’aldostérone et augmentation de la concentration de rénine. Dans ce cas de figure, la production d’aldostérone est secondaire à la sécrétion non régulée de rénine ;
  • autres cas d’hyperminéralocorticisme (engendré par un autre stéroïde que là que l’aldostérone) pour lesquels la concentration d’aldostérone et la concentration de rénine sont toutes les deux diminuées. C’est le cas de figure engendré par une consommation excessive de réglisse qui contient de l’acide glycyrrhizique, certaines tumeurs surrénaliennes secrétant d’autres minéralocorticoïdes, etc.

 

3. Diagnostic étiologique et principes thérapeutiques de l’hyperaldostéronisme primaire

Le traitement de l’hyperaldostéronisme primaire est conditionné par son étiologie, notamment la production unilatérale ou bilatérale d’aldostérone par le cortex surrénalien. En cas de sécrétion unilatérale, il s’agit généralement d’un adénome de Conn, tumeur bénigne du cortex surrénalien qui peut faire l’objet d’une exérèse chirurgicale (surrénalectomie unilatérale). Celle-ci permet la guérison complète de l’HTA et de l’hypokaliémie chez environ 50 % des patients. Chez les autres patients, on observe généralement une diminution de l’intensité de l’HTA et la disparition de l’hypokaliémie. Les causes d’échecs relatifs de la chirurgie sont notamment liées à un âge avancé du patient, une ancienneté de l’hypertension artérielle et à la présence d’une insuffisance rénale. Il est donc possible dans ces cas d’envisager un traitement médical plutôt que chirurgical.

Dans l’hyperplasie bilatérale, un traitement médical est recommandé. La molécule de première intention est la spironolactone, diurétique épargneur de potassium, qui se lie au récepteur minéralocorticoïde et empêche l’aldostérone d’activer son récepteur. Cette molécule se lie également aux récepteurs des androgènes et de la progestérone et peut donc être responsable d’effets secondaires à type de gynécomastie, hypogonadisme masculin, troubles menstruels chez la femme. En cas d’effets secondaires, on pourra proposer en deuxième intention de l’éplérénone qui possède une activité antagoniste minéralocorticoïde plus sélective et donc moins d’effets secondaires.

Les outils principaux qui peuvent être utilisés pour faire le diagnostic de maladie surrénalienne uni- ou bilatérale sont le scanner surrénalien et le cathétérisme des veines surrénaliennes. Le scanner est l’examen le plus simple à réaliser, mais les adénomes de Conn sont souvent de petite taille (< 1 cm) et un scanner normal n’élimine pas l’adénome de Conn. A contrario, les glandes surrénales des sujets de plus de 50 ans sont souvent le siège de nodules aspécifiques qui peuvent être un leurre. Le cathétérisme des veines surrénaliennes vise à doser dans l’effluent surrénalien la concentration d’aldostérone et à la comparer entre côté droit et côté gauche, une sortie unilatérale étant le témoin d’une maladie potentiellement curable par la chirurgie. Il s’agit néanmoins d’un examen invasif très spécialisé avec des difficultés de cathétérisme, notamment de la veine surrénalienne droite. L’examen est particulièrement utile, en cas de scanner douteux, chez un sujet pour lequel l’indication opératoire pourrait être portée en cas de maladie unilatérale.

 

 

Phéochromocytome

 

Ces tumeurs synthétisent des catécholamines telles que l’adrénaline et la noradrénaline ainsi que leurs métabolites : les métanéphrines. L’adrénaline et la noradrénaline exercent un effet cardiovasculaire vasoconstricteur et tachycardisant : elles élèvent la PA par la stimulation des récepteurs vasculaires ?-adrénergiques et par la stimulation du système rénine-angiotensine ; elles accélèrent le cœur par l’effet cardiaque ?-adrénergique. Les phéochromocytomes dérivent de la médullosurrénale.

Les tumeurs sécrétantes qui dérivent de ganglions sympathiques sont appelées paragangliomes et siègent du pelvis à la base du crâne. Ceux-ci peuvent secréter ou non des catécholamines et n’entraînent donc pas obligatoirement une HTA. La production excessive de catécholamines et l’association à une hypertension artérielle sont d’autant moins fréquentes que les paragangliomes sont situés en situation thoracique ou cervicale.

 

1. Présentation clinique

L’expression la plus fréquente de ces tumeurs est l’HTA, particulière par sa variabilité. La triade caractéristique de Ménard a une forte spécificité. Elle associe céphalées souvent pulsatiles, sueurs et palpitations liées à une tachycardie associée à une hypertension artérielle. Elle manque par contre de sensibilité puisqu’environ seulement un tiers des patients porteurs de phéochromocytome présente cette triade.

Une hypertension artérielle sévère, intermittente et notamment caractérisée par l’alternance de phases d’hypertension et d’hypotension est évocatrice. Les phéochromocytomes sont néanmoins responsables d’hypertension artérielle d’intensité variable voire minime et peuvent ainsi être découverts de manière fortuite, devant un incidentalome surrénalien chez un patient pour lequel on avait au préalable diagnostiqué une hypertension artérielle essentielle banale.

 

2. Diagnostic positif

Le diagnostic repose sur la mesure des métoxyamines (encore appelées métanéphrines) dans le plasma ou les urines de 24 heures. Les catécholamines (adrénaline, noradrénaline) sont produites de façon intermittente par le phéochromocytome, et le stress les élève de façon non spécifique, si bien que la mesure des catécholamines a une médiocre valeur diagnostique. De plus, du fait de leur demi-vie, leur concentration plasmatique peut être normale en cas de sécrétion intermittente. Les métanéphrines ont au contraire une demi-vie longue et sont produites en permanence par les phéochromocytomes. Un stress aigu majeur tel que la phase aiguë d’un infarctus du myocarde ou une insuffisance rénale peuvent entraîner une élévation des métanéphrines responsable de faux positifs. Des valeurs modérément élevées peuvent également être observées dans l’HTA essentielle.

 

3. Imagerie

L’imagerie précise le nombre, le siège et les rapports de la (ou des) tumeur(s), et détecte d’éventuelles métastases. Les phéochromocytomes de l’adulte sont bénins, uniques dans la majorité des cas et de grande taille donc faciles à localiser par scanner ou IRM. Les paragangliomes, les tumeurs multiples et les phéochromocytomes malins associés à des métastases sont généralement dépistés par TDM-TAP. Des outils d’imagerie fonctionnelle peuvent également être proposés, tels que la scintigraphie à la méta-iodobenzylguanidine (MIBG). La MIBG marquée se comporte comme un précurseur des amines et est captée par les cellules chromaffines, pour rentrer dans leur synthèse, permettant ainsi une imagerie scintigraphique. Une imagerie non spécifique, la TEP au fluoro-désoxyglucose (FDG) est également utile pour visualiser phéochromocytome et paragangliomes, qui sont souvent avides de glucose pour des raisons propres à leur métabolisme. Une positivité de la TEP-FDG n’est donc pas synonyme de malignité des phéochromocytomes.

 

4. Enquête génétique

Environ 40 % des phéochromocytomes sont secondaires à une anomalie génétique germinale susceptible d’être transmise au sein des familles. Celle-ci peut s’intégrer dans un contexte syndromique (neurofibromatose de type 1, maladie de von Hippel-Lindau, néoplasie endocrinienne multiple de type 1, etc.) ou non, mais une anomalie génétique est retrouvée dans environ 20 % des formes apparemment sporadiques. De fait, il est recommandé de systématiquement dépister une maladie génétique devant un phéochromocytome ou un paragangliome même en l’absence d’antécédent familial évident.

La cause la plus fréquente de phéochromocytome et paragangliome est la mutation des différentes unités de l’enzyme succinate déshydrogénase (SDH). La perte de fonction de ces gènes induit une hypoxie tissulaire responsable de la sécrétion réactionnelle de facteurs tissulaires angiogéniques qui aboutissent à la formation de tumeurs au niveau du tissu chromaffine. Parmi les autres causes génétiques citons les mutations du gène RET, qui sont responsables de néoplasies endocriniennes multiples de type 2 (carcinome médullaire thyroïdien, hyperparathyroïdie primaire).

 

5. Traitement

Le traitement du phéochromocytome est l’exérèse chirurgicale. Celle-ci expose au risque de fluctuations tensionnelles majeures durant l’intervention chirurgicale (instabilité hémodynamique peropératoire) liées au relargage massif de catécholamines lors de la manipulation de la tumeur. Il est donc indispensable de réaliser un bilan préopératoire du retentissement vasculaire, de préparer les patients en essayant de normaliser tant que se peut la pression artérielle avant la chirurgie grâce à des alphabloquants. Le traitement par chirurgie doit être encadré par une équipe anesthésique entraînée, qui pourra réaliser un monitoring tensionnel permanent et réaliser des traitements par drogues hypertensives et hypotensives d’action rapide pour limiter l’instabilité hémodynamique et la morbidité peropératoire.

Environ 10 % des phéochromocytomes sont malins, mais la mise en évidence de malignité est difficile sur le plan histopathologique, son diagnostic n’étant porté qu’en présence d’une invasion régionale de la tumeur ou de métastases à distance. Il est donc essentiel de réaliser un suivi prolongé de tout patient opéré d’un phéochromocytome, même en cas de rémission complète. Celui-ci est réalisé grâce à la clinique et au dosage des métanéphrines.

 

 

Autres causes rares d’HTA endocrine

 

L’HTA est fréquente dans l’acromégalie, et peut être améliorée par la correction de l’hypersécrétion de l’hormone de croissance (cf. Item 242 – Adénome hypophysaire). Rappelons que l’hypertension artérielle isolée ne justifie pas un dépistage biologique de l’acromégalie, mais que celui-ci est justifié si elle est associée à d’autres comorbidités telles qu’apnées du sommeil, diabète de type 2, douleurs articulaires diffuses, syndrome du canal carpien, trouble de l’articulé dentaire, céphalées diffuses et chroniques, hypersudation et manifestation morphologique typique (élargissement des extrémités). Dans ces conditions, le dépistage biologique repose sur le dosage de l’IGF-1.

Le syndrome de Cushing, indépendamment de son étiologie, peut également entraîner une hypertension artérielle (cf. Item 242 – Adénome hypophysaire). Rappelons que le syndrome de Cushing ne doit être dépisté devant une hypertension artérielle que s’il existe également des symptômes cliniques évocateurs, et ce d’autant plus que ceux-ci sont spécifiques (distribution faciotronculaire des graisses, amyotrophie, fragilité cutanée ou capillaire, vergetures pourpres, ostéoporose chez un sujet jeune). Dans ce cas, le dépistage repose selon les conditions en un seul des tests suivants : recueil des urines de 24 heures pour mesure du cortisol libre urinaire et de la créatininurie, test de freinage minute avec 1 mg de dexaméthasone ou dosage du cortisol salivaire après un recueil entre 23 h et 0 h, lorsque ce dosage est disponible.

L’hypertension artérielle peut également être rencontrée dans l’hyperthyroïdie et hyperparathyroïdie primaire.

 

 

 

Points clés

 

L’enquête initiale d’une HTA (interrogatoire, examen clinique, dosage de la kaliémie) a pour but de ne pas méconnaître une HTA secondaire potentiellement curable, parmi lesquelles les HTA endocrines.

– Les causes surrénaliennes d’HTA sont les hyperaldostéronismes primaires (HAP), les phéochromocytomes et les syndromes de Cushing.

 

Hyperaldostéronismes primaires

– L’HAP est la cause d’HTA endocrine la plus fréquente (5 % des cas d’HTA) et potentiellement curable par la chirurgie.

– L’HAP est associé à un surrisque cardiovasculaire et rénal par rapport à l’HTA essentielle.

– L’HAP doit être dépisté systématiquement par la mesure de la kaliémie et recherché en cas d’HTA résistant au traitement, chez un sujet jeune, avec un retentissement vasculaire disproportionné par rapport à la sévérité de l’HTA.

– Le dépistage de l’HAP repose sur la mesure en position assise du rapport aldostérone/rénine plasmatique qui est élevé. Celui-ci doit idéalement être réalisé avant la mise sous traitement antihypertenseur ou après un wash-out des drogues interférant avec le système rénine-angiotensine. On ne conservera que les calcibloqueurs et les alphabloqueurs. La contraception orale et un régime désodé strict peuvent également perturber la biologie du système rénine-angiotensine.

– La différenciation entre production unilatérale (adénome) ou bilatérale (hyperplasie bilatérale) d’aldostérone conditionne les indications thérapeutiques (bilatérale : traitement médicale par antagoniste du récepteur minéralocorticoïde ; unilatérale : possible surrénalectomie unilatérale), mais est difficile, ne repose pas sur le seul scanner et doit être réalisée en milieu très spécialisé.

 

Phéochromocytome

– Le phéochromocytome est une cause rare d’HTA d’intensité variable, parfois très sévère mais parfois d’allure banale.

– Envisagé devant un incidentalome surrénalien d’allure non corticale au scanner, le diagnostic de phéochromocytome repose sur le dosage des métanéphrines plasmatiques ou urinaires.

– Le traitement du phéochromocytome est chirurgical, par une équipe anesthésique entraînée, après préparation tensionnelle par des alphabloquants.

– Le phéochromocytome est la tumeur endocrine répondant le plus fréquemment à un déterminisme génétique et doit donc bénéficier d’une enquête génétique systématique.

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© CEEDMM – Mai 2020