Item UE7-OT-207 Sarcoïdose –

Polycopié des enseignants en Endocrinologie, Diabète et Maladies métaboliques (3ème édition 2015)
Item UE7-OT-207 Diagnostiquer une sarcoïdose
I. Diagnostiquer une sarcoïdose hypothalamo-hypophysaire
II. Diagnostiquer une sarcoïdose HH chez un patient suivi pour une sarcoïdose
III. Diagnostiquer une sarcoïdose HH chez un patient sans notion préalable de sarcoïdose
Objectif ECN – Diagnostiquer une sarcoïdose – Décrire les principes du traitement et de la prise en charge au long cours |
I. Diagnostiquer une sarcoïdose hypothalamo-hypophysaire
L’atteinte hypothalamo-hypophysaire (HH) de la sarcoïdose est une atteinte exceptionnelle dont le diagnostic est souvent tardif. Cette atteinte est due à une infiltration de la région hypothalamo-hypophysaire par des granulomes sarcoïdiens (granulome épithélioïde et giganto-cellulaire sans nécrose caséeuse).
Cette infiltration peut provoquer des déficits hormonaux, dont deux principaux, le diabète insipide et l’insuffisance gonadotrope, dont la prise en charge pourra améliorer l’état de santé du patient.
A. Tableau endocrinien
Les deux atteintes les plus fréquentes sont le diabète insipide central et l’insuffisance gonadotrope.
L’atteinte de l’hypophyse antérieure se caractérise par un ou plusieurs déficits hypophysaires, jusqu’au panhypopituitarisme avec une hyperprolactinémie souvent associée (infiltration de la tige par les granulomes à l’origine de la perte du tonus inhibiteur de la dopamine).
Le déficit de la post-hypophyse s’exprime par un diabète insipide central qui est secondaire à l’infiltration granulomateuse au niveau de l’infundibulum (lieu de production de l’hormone anti-diurétique (ADH)). Un syndrome polyuropolydipsique (>50 ml d’urine/kg/jour) est présent avec hypoosmolarité urinaire (<300 mosm/kg). Le diagnostic est fait par un test de restriction hydrique en milieu spécialisé.
B. Tableau radiologique
L’IRM cérébrale avec coupes centrées sur la région HH est l’examen de référence pour le diagnostic.
Technique T1, T2, avec injection de gadolinium (hyperfixation au niveau des lésions actives, c’est à dire toujours inflammatoires)
Description Il existe une infiltration du plancher du 3ème ventricule, de l’infundibulum, et/ou une tige hypophysaire épaissie, voir une hypophyse augmentée de volume de façon homogène. L’aspect de l’hypophyse évoque une hypophysite et rarement un adénome hypophysaire. Les lésions actives prennent le contraste lors de l’injection de Gadolinium. Cette atteinte HH peut s’associer à une atteinte des méninges et du parenchyme cérébral.
Diagnostics différentiels
Tuberculose, Histiocytose, Lymphome, Autres tumeurs de la région hypothalamo-hypophysaires
II. Diagnostiquer une sarcoïdose HH chez un patient suivi pour une sarcoïdose
A. Epidémiologie
Une atteinte neurologique centrale est présente chez 5 à 10 % des patients suivis pour une sarcoïdose, l’atteinte HH en fait partie mais est exceptionnelle. Les patients avec atteinte HH présentent le plus souvent de nombreuses autres atteintes d’organes, soit une sarcoïdose multiviscérale (atteinte pulmonaire, neurologique, ophtalmologique et/ou ORL).
B. Circonstances de diagnostic
– Découverte fortuite d’une lésion typique infiltrant la région HH sur une IRM cérébrale (Figure 1A)
– Découverte de déficits endocriniens lors d’un interrogatoire détaillé ; les signes endocriniens sont souvent mis au second plan (soif, troubles de la libido, asthénie, troubles des phanères) dans le contexte de la maladie chronique
C. Examens complémentaires
Affirmer le diagnostic de diabète insipide central et/ou de déficits anté-hypophysaires. (Cf Item Adénome Hypophysaire).
En cas de découverte radiologique même en l’absence de symptômes spécifiques, un bilan hormonal est conseillé: Natrémie, Testostérone totale, libre (Homme), oestradiol (Femme), FSH et LH, T4L et TSH, Prolactine, éventuellement Gh et IGF-1. L’exploration de l’axe corticotrope comportera la mesure du cortisol et ACTH à 8h, puis Test au Synacthène. Si le patient est sous corticothérapie au long cours, rien ne permet de différencier un déficit corticotrope secondaire à la corticothérapie d’une atteinte HH de la sarcoïdose.
La présence de déficits endocriniens avec une imagerie en faveur d’une infiltration HH suffit à retenir le diagnostic d’atteinte HH chez un patient présentant une sarcoïdose. Il n’est pas nécessaire de proposer une biopsie hypophysaire.
Figure 1 : Coupes coronales centrées sur la région HH, avec injection de gadolinium, montrant (A) plusieurs lésions infiltrantes, au niveau du V3, de la tige, centre de l’hypophyse associées à des lésions parenchymateuses, puis (B) une disparition de toutes les lésions après 5 ans de traitement
III. Diagnostiquer une sarcoïdose HH chez un patient sans notion préalable de sarcoïdose
A. Epidémiologie
La probabilité qu’une lésion HH soit due à cette pathologie est rare. Parmi les lésions atteignant la région HH, se retrouveront dans l’ordre de fréquence, les adénomes hypophysaires (90% des cas), les tumeurs extra hypophysaires envahissant la région (méningiome), d’autres tumeurs (craniopharyngiome), puis les pathologies inflammatoires infiltratives.
B. Circonstances de diagnostic et explorations
Il s’agit cette fois d’un patient consultant en endocrinologie/médecine interne pour exploration d’une lésion hypophysaire ou de la région HH (cf Item Adénome hypophysaire). Le plus souvent, les caractéristiques radiologiques permettent d’éliminer un adénome hypophysaire et orienteront vers un processus infiltrant (Figures 2-4) .
Figure 2 : Coupe coronale T1, avec injection de gadolinium, montrant un élargissement isolé de la tige pituitaire
Figure 3:Infiltration diffuse de l’infundibulum et hypohyse, chez un homme de 77 ans, avec diabète insipide et panhypopituitarisme à l’origine de la découverte de la sarcoidose (d’ après Miyoshi T, Endocrine Journal, 2007 ; 54, 425-430 )
Figure 4 :Tableau systémique chez une femme de 33 ans associant fièvre, arthralgies, dysarthrie, dysphagie, aménorrhée et syndrome polyuropolydipsique faisant découvrir une sarcoidose multiviscérale avec infiltration HH importante (d’après Tabuena RP, Internal Medicine ; 2004 : 43, 960-966)
Les explorations ultérieures vont
1- Faire le bilan endocrinien des déficits
2- Collecter les arguments en faveur de la sarcoïdose (Cf Item général 207 : atteinte pulmonaire évocatrice, élévation de l’ACE, absence d’argument pour une tuberculose, preuve histologique de granulome non caséux) et éliminer les diagnostics différentiels.
Dans des cas exceptionnels (atteinte isolée de l’hypophyse, sans autres lésions biopsiables, bilan général négatif), une biopsie de la région HH pourra être discutée.
En parallèle du traitement général de la sarcoïdose si nécessaire, les déficits hormonaux devront être supplémentés. Même en cas de corticothérapie précoce et de disparition des lésions sur l’imagerie, les déficits persistent et justifient un suivi endocrinologique.