Limitation du remboursement du dosage de la 25-hydroxyvitamine D (25OHD)

Remboursement du dosage de la vitamine D : un communiqué des Sociétés Françaises de Biologie Clinique, de Dialyse, d’Endocrinologie, d’Endocrinologie Pédiatrique, de Gériatrie et Gérontologie, de Médecine Nucléaire, de Mucoviscidose, de Néphrologie, de Néphrologie Pédiatrique, de Rhumatologie et du GRIO

 

La récente décision de l’UNCAM publiée le 14 août 2014 au Journal Officiel de limiter le dosage de la 25-hydroxyvitamine D (25OHD) à quelques indications seulement, fait suite à un rapport de la HAS motivé par la très forte augmentation du nombre de prescriptions de ce dosage et par le coût exorbitant généré par leur remboursement. Cette décision soulève trois commentaires :

1) Il ne faut pas doser la vitamine D à tout le monde.
Nous sommes en effet d’accord avec les pré-requis définis par la HAS dans son rapport pour décider de l’intérêt du dosage de vitamine D en pratique clinique :

   – Le lien entre vitamine D et pathologie peut être défini.
   – Un seuil thérapeutique pour les concentrations en 25OHD peut être défini.
   – Le dosage préalable et au cours du suivi améliore les résultats cliniques d’une supplémentation en vitamine D.

Force est de reconnaître qu’aujourd’hui ces éléments ne sont réunis que pour certaines maladies osseuses, rénales ou digestives et pour toute situation de métabolisme phospho-calcique pathologique.

2) Ne pas doser la 25OHD ne veut pas dire ne pas prescrire de la vitamine D.
L’insuffisance en vitamine D est très fréquente en France. Nous craignons qu’une lecture rapide du rapport et surtout du communiqué de presse de la HAS fasse apparaitre une réticence à une supplémentation sans dosage préalable. Ceci serait dommageable notamment pour les populations pédiatriques et gériatriques, mais aussi pour tous les patients qui présentent des risques d’hypovitaminose D très bien définis par de nombreuses études épidémiologiques : âge supérieur à 60 ans, peau pigmentée, surpoids, port de vêtements couvrants, faible activité en extérieur, régime végétarien …et plus généralement pendant les mois les moins ensoleillés.

3) Si le dosage de 25OHD est considéré par l’ensemble des sociétés savantes et groupes d’experts du monde entier comme important dans une situation clinique donnée, il doit alors être remboursé sans ambiguïté dans cette situation, même si les données scientifiques peuvent être perfectibles.

Nous pensons que le libellé suivant des indications du dosage de vitamine D qui restent remboursées selon le JO du 14 août 2014, ne répond pas à cette logique car le nombre de situations cliniques citées est trop restrictif et peu explicite :

« Suspicion de rachitisme et d’ostéomalacie ; respect des RCP (résumé des caractéristiques produit) des médicaments qui préconisent le dosage de vitamine D ; personnes âgées faisant des chutes répétées ; suivi ambulatoire de l’adulte transplanté rénal au-delà de 3 mois après transplantation ; traitement chirurgical de l’obésité chez l’adulte ».

Une fois, énoncés ces trois commentaires, nous pensons que le libellé de ces indications remboursées nécessite quelques explications afin d’être interprété correctement dans l’intérêt des patients.

Rappelons tout d’abord que devant toute situation de fragilité osseuse définie par une fracture peu traumatique ou une densité minérale osseuse basse, la démarche diagnostique doit rechercher une pathologie susceptible d’induire, ne serait-ce qu’en partie, une fragilité osseuse dite secondaire. C’est en effet le traitement de cette pathologie sous-jacente qui permettra alors l’amélioration du statut osseux. Parmi ces  pathologies, on trouve bien sûr l’ostéomalacie. Il est donc raisonnable pour nous de considérer que ces situations de fragilité osseuse correspondent bien à l’indication de « suspicion d’ostéomalacie » pour laquelle le dosage de 25OHD est remboursé.

De même l’ostéomalacie doit être suspectée au cours de la prise en charge de l’insuffisance rénale chronique avec un DFG<45 mL/mn/1,73 m² chez les adultes, et <60 mL/mn/1.73 m² chez les enfants, dialysés ou non, et de toute pathologie responsable de malabsorption intestinale, car elle est une des complications osseuses possibles de ces maladies. On peut d’ailleurs souligner que ces situations répondent bien aux pré-requis définis par la HAS en raison notamment de la difficulté à corriger le déficit en vitamine D avec les posologies habituelles chez ces patients.

Enfin, les RCP de tous les traitements de l’ostéoporose demandent au minimum d’avoir une supplémentation adéquate en vitamine D, ce qui sous-entend d’avoir un dosage préalable de 25OHD. Il a en effet été largement montré que pour définir ce qui était adéquat il était indispensable de connaitre la valeur de départ pour déterminer la nécessité d’un éventuel apport de charge suivi d’une supplémentation à dose variable suivant les patients.

En conclusion, nous continuons de déplorer que le libellé de conditions restrictives de remboursement du dosage de la 25OHD soit une telle source de confusion alors que les propositions que nous avons faites aux autorités de santé, beaucoup plus en accord avec les recommandations actuelles et la pratique clinique, ne remettent pas en cause le principe général de réduction des prescriptions de ce dosage.
Nous regrettons tout particulièrement que l’intérêt du dosage de la vitamine D lors des explorations du métabolisme phosphocalcique n’ait pas été retenu alors qu’il s’agit de l’indication la plus consensuelle de ce dosage biologique, toutes spécialités médicales confondues. Nous continuons donc de militer pour plus de clarté.
Dans l’immédiat et en attendant des progrès, il reste à définir à qui revient la responsabilité de déterminer le caractère remboursé ou non de la prescription du dosage. C’est le prescripteur qui est en charge de la démarche diagnostique. En conséquence, et à l’instar de ce qui se fait pour le médicament, c’est donc à lui de bien interpréter le texte et d’informer le biologiste, comme il le fait pour le pharmacien, en apposant la mention « non remboursée » sur l’ordonnance lorsqu’il considère que sa prescription ne rentre pas dans le champ décrit. Le caractère inédit de cette situation justifie certainement qu’il précise aussi dans les autres cas « condition remboursée » pour éviter toute ambiguïté. Modifier ce schéma reviendrait à bouleverser les relations actuelles entre les différents professionnels de santé ce qui, espérons-le n’est absolument pas l’esprit de la décision de l’UNCAM.

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© SFE Décembre 2014