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A chacun son rythme !

Elisa Dybal, Lyon

Symposium SFE 09 – Les hormones en rythme-
Implications métaboliques et hormonales des rythmes alimentaires
David JACOBI, Nantes
L’horloge circadienne et ses sabliers moléculaires
Anne-Marie FRANÇOIS-BELLAND, Marseille
Le travail posté : pourquoi la perturbation de la physiologie a des conséquences sanitaires ?
Claude GRONFIER, Lyon

 

Ce symposium matinal a permis de mettre en exergue le rôle du rythme circadien sur le métabolisme.

La première chose à retenir est qu’il existe une horloge physiologique ayant sa propre périodicité. Cela a été montré notamment par l’expérience historique de Michel Siffre en 1962, qui a passé près de 2 mois à 120m de profondeur, afin d’étudier ses propres rythmes de coucher et lever. Son activité s’est décalée d’environ 30 minutes chaque jour, soit un cycle ayant une période d’environ 24 heures et 30 minutes. Par la suite, cela a été reproduit avec des conditions contrôlées de laboratoire sur des centaines d’individus et coïncide avec une distribution ayant une période médiane de 24,15 heures. Certains individus ont une période plus courte, ce sont les « chronotypes du matin » et d’autres une période plus longue, les « chronotypes du soir ». Il faut donc oublier l’idée de voir vos enfants s’endormir à 21h si ce n’est pas leur chronotype !

Cette horloge biologique est située dans les noyaux suprachiasmatiques hypothalamiques, sensibles à la lumière, via des récepteurs rétiniens découverts en 2022, les cellules à mélanopsine. Ainsi, l’exposition à la lumière peut influer sur cette horloge notamment en jouant sur la sécrétion de mélatonine. Et c’est grâce à cela que chaque jour nous nous resynchronisons à la période terrestre de 24h.

Mais que se passe-t-il si l’on perd cette exposition ? C’est notamment le cas du travail de nuit, qui a fait l’objet d’un rapport de l’ANSES sous la direction de Claude GRONFIER en 2016. Il est clair que l’alternance de rythmes de travail ne permet pas la synchronisation de l’horloge biologique, notamment sur la production de mélatonine qui reste nocturne. Cela induit une somnolence au travail la nuit et un sommeil de mauvaise qualité le jour. En étudiant des personnes « désynchronisées », on observe une dépense énergétique moindre, une sécrétion de leptine amoindrie, une augmentation de l’insulinémie et de l’intolérance au glucose, mais également un profil protéomique ne retrouvant plus sa dichotomie jour/nuit. On met donc ici le doigt sur toutes les conséquences en termes de santé publique maintenant connues du travail de nuit à savoir une augmentation du syndrome métabolique, du risque cardiovasculaire, du risque de cancer, une altération des performances cognitives et aune augmentation de l’accidentologie …

De plus, il existe des horloges dites « périphériques » notamment en lien avec une rythmicité d’expression de certaines protéines au niveau du foie ayant des impacts métaboliques. En plus de leur rythmicité endogène, ces expressions peuvent être influencées par la prise alimentaire. Chez la souris exposée à un régime « high-fat », la restriction temporelle de la prise alimentaire permet de protéger de la prise de poids. Au regard de cette donnée, que penser du jeune intermittent chez l’homme ? Les études sont multiples mais aucune ne retrouve d’effet bénéfique de la restriction temporelle sur la perte de poids en régime isocalorique. En revanche, la restriction temporelle induit en elle-même une tendance à la restriction calorique, pouvant conduire à une perte de poids, sans différence avec une restriction seule sans plage horaire. Enfin, il a également été montré qu’une répartition de l’alimentation en faveur d’un apport énergétique plus important le matin versus le soir avait un avantage sur la satiété. En pratique, tout cela reste à individualiser à votre patient selon sa propre rythmicité !

 

Depuis Logan, R.W., McClung, C.A. Rhythms of life: circadian disruption and brain disorders across the lifespan. Nat Rev Neurosci 20, 49–65 (2019). https://doi.org/10.1038/s41583-018-0088-y