Des modèles de rongeurs pour l’étude du microenvironnement des tumeurs hypophysaires ?
Nicolas Sahakian, Marseille
Dr. Etienne Lefevre, Paris ; Marie Chanal, Lyon
Les modèles précliniques de tumeurs hypophysaires actuellement utilisés ne permettent pas de reproduire fidèlement la tumorigénèse hypophysaire. En effet, les modèles de tumeurs, organoïdes ou xénogreffes sous cutanées ne permettent pas de d’évaluer le développement d’une tumeur au sein de l’hypophyse ni d’évaluer l’interaction entre la tumeur et microenvironnement. C’est pourquoi le développement de modèles orthotopiques de tumeurs hypophysaires est nécessaire.
Il a été montré dans un modèle de rates Wistar-Furth que l’injection stéréotaxique orthotopique de cellules somatotropes GC dans l’antéhypophyse conduisait à la survenue de tumeurs hypophysaires. Douze rates ont été traitées selon de cette procédure et ont été suivies jusqu’à 51 jours après l’intervention, avec une surveillance clinique, biologique et radiologique régulière. Onze (92%) rates ont développé une tumeurs hypophysaire, invasive et de croissance rapide, conduisant au décès avant la fin de l’étude chez 7 (58%) animaux. Bien que les rates ne présentaient aucun signe clinique d’acromégalo-gigantisme, l’analyse histologique après exérèse retrouvait un marquage Pit1 et GH, compatible avec la nature somatotrope. La prolifération tumorale était très élevée, avec un index de prolifération Ki67 moyen à 50% (maximal à 72%) et de nombreuses mitoses. L’analyse du microenvironnement tumoral mettait en évidence un marquage CD34 (cellules endothéliales), S100B (cellules folliculostélaires), CD68 (macrophages) et CD3 (lymphocytes), similaire à celui retrouvé dans les tumeurs hypophysaires chez l’homme. Il pourrait ainsi s’agir d’un modèle pertinent pour l’évaluation des tumeurs hypophysaires agressives et l’évaluation de leurs thérapeutiques.
Un second modèle rapporte la faisabilité de xénogreffes tumorales orthotopiques dans l’antéhypophyse de souris immunodéficientes RAG2KO. Après injection stéréotaxique, le développement tumoral a été suivi par IRM. Une analyse histologique des hypophyses greffées, réalisée après sacrifices des souris au 19ème jour, montrait une tumeur hypophysaire dont la taille était corrélée à la quantité de cellules injectées. On retrouvait au sein du microenvironnement un marquage CD34 (cellules épithéliales) et F4/80 (macrophages), comparable à celui retrouvé précédemment. Avec un taux de survie à plus de 95%, ce modèle semble intéressant pour évaluer la progression tumorale in situ, le microenvironnement et éventuellement la réponse à des thérapeutiques. Enfin, ce modèle permettrait d’évaluer l’effet du sous type histologique sur la composition du micro-environnement.
En conclusion, ces deux modèles permettent l’étude de la progression in situ des tumeurs hypophysaires, de leurs interactions avec le microenvironnement, et pourraient être utile dans l’évaluation de nouvelles thérapeutiques.