Elévations de la PTH sans autre anomalie dans le cadre des bilans d’ostéoporose : qu’en penser ?


Question du Dr R.G.:
Nous sommes de plus en plus souvent consultés pour des élévations de la PTH sans autre anomalie dans le cadre des bilans rhumatologiques d’ostéoporose. Il me parait primordial dans le cadre de ces « hyperparathyroidies normocalcémiques » (bien sur une fois la Vit D normalisée) de documenter le caractère inapproprié de la PTH de façon simple. Je pense par exemple au cas d’une patiente de 78 ans pour laquelle ce diagnostic m’est apparut discutable ou en tout cas trop rapide. Merci pour votre réponse.

Réponse de Pascal Houillier et Florence Trémollieres :
Tout à fait d’accord avec le fait qu’une hyperparathyroïdie normocalcémique réclame un diagnostic, surtout si elle s’accompagne d’une déminéralisation osseuse et/ou d’une lithiase calcique.
La première étape est de s’assurer que la patiente est réellement normocalcémique. En effet, les laboratoires d’analyse ne donnent jamais la valeur de la calcémie « corrigée » et souvent les dosages demandés de calcémie ne sont pas associés au dosage de l’albumine ou des protides. La 2ème étape est d’éliminer toute insuffisance en vitamine D (qui est souvent rencontrée chez les sujets âgés), ce qui soulève parfois la question de la fiabilité du dosage utilisé, de la période de l’année où il est réalisé (été vs hiver) et du seuil de « normalité » pris en compte .
Eventuellement, si l’accès à une mesure de Ca ionisé est possible (et si cette mesure est faite selon une méthodologie rigoureuse, ce qui n’est pas toujours le cas…), cela peut constituer un moyen d’avancer. Il existe en effet une proportion non négligeable (environ 15 %) de patients dont la calcémie est « apparemment » normale, mais dont la concentration de Ca ionisé est élevée. Si le Ca ionisé est élevé, le diagnostic d’hyperparathyroïdie primitive est alors presque certain.

En cas d’atteinte tissulaire potentielle et notamment osseuse (la raison la plus fréquente étant souvent celle d’un « bilan » d’ostéoporose), le dosage des marqueurs du remodelage osseux (ostéocalcine et CTX) apparaît indiqué, une élévation franche orientant vers l’hyperparathyroïdie primitive (sous réserve encore une fois, de la normalité du 25-OH-vitamine D) et la responsabilité potentielle de celle-ci dans l’ostéoporose. De même, la calciurie des 24h (qui est toujours abaissée en cas d’hypovitaminose D) peut être un élément contributif au diagnostic d’hyperparathyroïdie primitive.

Il peut être justifié d’aller jusqu’à des tests dynamiques, en particulier si la concentration de PTH reste élevée pendant plusieurs mois après une correction soutenue de la concentration de 25OHvitamine D et après exclusion des autres causes d’hyperparathyroïdie secondaire (attention à l’insuffisance rénale chronique modérée : au stade 3 de la MRC (DFG entre 30 et 60 mL/min/1,73 m2), 50 % des patients ont une hyperparathyroïdie secondaire. Si la calcémie est réellement normale, ces tests constituent le seul moyen de montrer que la sécrétion de PTH est inappropriée.

Pascal Houillier – Département de Physiologie – Hôpital Européen Georges Pompidou et Florence Trémollieres – Centre de Ménopause Hôpital Paule de Viguier CHU de Toulouse – Mars 2010