Incidentalomes surrénaliens : et si on limitait les imageries de suivi ?

Héléna Mosbah, Poitiers

Pr Martin Fassnacht, management of patients with adrenal incidentalomas-update from the ESE-ENSAT guidelines 2023 SY031 

Les recommandations concernant la prise en charge des incidentalomes surrénaliens ont été mises à jour et récemment publiées dans l’EJE, en Mai 2023. Elles permettent de mieux guider le clinicien dans l’évaluation du risque de malignité d’une tumeur surrénalienne découverte de façon fortuite. Pour rappel, la fréquence des incidentalomes surrénaliens dans les séries autopsiques est estimée à 3%, avec une augmentation graduelle à partir de la 3ème décade.   Les corticosurrénalomes représentent 0,4 à 4% des incidentalomes surrénaliens et les tumeurs malignes d’origine extra-surrénalienne 3 à 7%.

Le bilan hormonal de première intention comporte la recherche d’une hypersécrétion : freinage minute à la dexaméthasone, métanéphrines et normétanéphrines plasmatiques ou urinaires, rapport aldostérone/rénine en cas d’hypertension et/ou d’hypokaliémie. Le dosage des précurseurs des stéroïdes sexuels et de la stéroïdogenèse sera réalisé en cas de suspicion clinique ou paraclinique de corticosurrénalome.  Si le bilan hormonal initial est normal, il n’y a pas d’indication à le refaire de façon systématique, sauf en cas d’apparition ou d’aggravation de comorbidités telles que l’hypertension artérielle ou le diabète de type 2.

Le scanner sans injection de produit de contraste est l’examen privilégié pour la caractérisation d’une masse surrénalienne. Une tumeur homogène dont la densité spontanée est inférieure à 10 UH peut être considérée comme bénigne, indépendamment de sa taille. Dans cette situation, il n’est pas recommandé de renouveler les imageries de suivi.

Si la masse est homogène avec une densité spontanée entre 10 et 20 UH, que le bilan hormonal est normal et que la taille tumorale est <4 cm, il est recommandé de réaliser une imagerie complémentaire, pour éviter des imageries répétées au cours du suivi. Une autre stratégie est de proposer une imagerie de type scanner dans un délai de 12 mois.

Si la tumeur mesure plus de 4 cm avec une densité spontanée supérieure à 20 UH ou une tumeur hétérogène, le risque de malignité est élevé, nécessitant une prise en charge en équipe pluridisciplinaire, et le plus souvent, une intervention chirurgicale. Si la chirurgie n’est pas réalisée, une imagerie de suivi à 6-12 mois est recommandée.

La biopsie surrénalienne n’est pas recommandée de façon systématique, sauf en cas d’histoire de tumeur maligne extra-surrénalienne, et si le diagnostic histologique modifie la prise en charge oncologique.

Enfin, les dossiers d’incidentalomes surrénaliens doivent être discutés en équipe pluridisciplinaire spécialisée si l’image n’est pas en faveur de la bénignité, s’il existe des anomalies du bilan endocrinien, si une croissance tumorale apparait dans le suivi, ou si une décision chirurgicale est prise.

 

 

Stratégie d’imagerie en cas d’incidentalome surrénalien.

Figure tirée de European Society of Endocrinology clinical practice guidelines on the management of adrenal incidentalomas, in collaboration with the European Network for the Study of Adrenal Tumors, M.Fassnacht et al, EJE, 2023. 1L’imagerie complémentaire peut être une Tep TDM au FDG, une IRM couplée à la spectroscopie, un TDM avec calcul du washout. 2En cas de lésions surrénaliennes bilatérales avec les mêmes caractéristiques en imagerie, une biopsie pourrait être considérée. 3Après un bilan d’extension complet comprenant TDM thoraco-abdomino-pelvien. MDT = multidisciplinary team.