Parcours diagnostique dans l’acromégalie : la parole au patient !

Helena MOSBAH, Poitiers

Pr Philippe Chanson, Acromégalie et apparence corporelle

L’acromégalie est liée à une hypersécrétion d’hormone de croissance (GH), le plus souvent en lien avec un adénome hypophysaire. Elle entraîne de nombreuses complications physiques associées à des changements morphologiques qui peuvent avoir un impact psycho-social important.  La qualité de vie, mesurée au moyen d’outils génériques comme le SF-36, ou plus spécifiques comme l’AcroQOL, est altérée chez ces patients. Elle est plus altérée chez les femmes que chez les hommes.

Quelles données a-t-on sur le parcours de soins de ces patients ? Le délai diagnostique est long. Il est estimé en moyenne à 14 ans dans l’acromégalie. Le délai diagnostique est de 2 à 4 ans supérieur chez les femmes.  Le diagnostic est fait 4,5 ans plus tard chez les femmes. Les hommes ont vu en moyenne 2,7 médecins avant que le diagnostic ne soit posé, alors que les femmes en ont vu 4 ! Le temps entre le début des symptômes et la consultation médicale pour ces symptômes est le même dans les 2 sexes, mais le temps pour aboutir au diagnostic est plus long chez la femme. Pourquoi ? Les modifications morphologiques pourraient être plus insidieuses chez les femmes. Par ailleurs, Le syndrome dysmorphique impacte de façon différente les hommes et les femmes, comme l’attestent les scores inférieurs de qualité de vie concernant l’intimité et l’apparence corporelle.

Une étude qualitative a été réalisée par l’équipe de Bicêtre (Sibeoni et al, EJE, 2019). Elle a montré le point de vue des patients acromégales sur leur parcours de soins, au moyen d’entretiens semi-structurés.   Avant le diagnostic, les patients rapportent des symptômes et signes précoces parfois peu pris en compte, liés au développement très lent et insidieux de leur maladie. Ils décrivent une crainte majeure de ne pas se reconnaître et rapportent une incompréhension, une difficulté à traduire ce qui se passe. Le moment du diagnostic est un moment clé. Il se traduit par un certain soulagement, tout de même mêlé d’inquiétude. Ce diagnostic les fait se rendre compte de leur anomalie physique. Ils peuvent ressentir un sentiment de honte, de laideur. Après le diagnostic, ils décrivent la prise de conscience des conséquences qu’ils pressentent comme irréversibles. Le regard d’eux-mêmes et des autres peut devenir obsédant. Ils ont le sentiment d’être envahis par la maladie, avec un risque d’émergence de troubles psychiatriques. A ce moment, une rupture des liens sociaux peut se produire.

Il semble donc essentiel d’écouter attentivement les difficultés rapportées par les patients, qui sont parfois très éloignées des difficultés soulevées par le professionnel de santé ! Trouver un compromis permet d’améliorer l’adhésion thérapeutique et in fine, le bien-être des patients. Le moment du diagnostic est un moment crucial. Un accompagnement psychologique doit être systématiquement proposé aux patients à cette étape du parcours.